Critique: David Heska Wanbli Weiden, Justice indienne


 Couverture

Paris, Gallmeister, 2021, 414 p.

Du rififi sur la réserve…

L’action du super polar ethnologique Justice Indienne, de David Heska Wanbli Weiden, se situe sur la réserve de Rosebud dans le Dakota du sud, un de ces lieux où le système légal américain refuse d’enquêter sur la plupart des crimes, alors que la police tribale manque de moyens. C’est pourquoi, en cas de problème, les gens de la réserve font appel à Virgil Wounded Horse, un Lakota justicier autoproclamé qui loue ses gros bras et ses méthodes (très) violentes et peu orthodoxes pour quelques billets.

Le récit (narré par Virgil) commence d’ailleurs en force avec une démonstration frappante des talents très spéciaux de Virgil qui s’en prend à un violeur d’enfants.

L’action principale démarre quand Ben Short Bear, membre du conseil tribal et père de Marie Short Bear, ex-copine de Virgil, lui demande de mettre fin aux agissements de trafiquants qui tentent d’introduire l’héroïne sur la réserve. Avec l’aide de son ex, la belle Marie, une Lakota traditionaliste, très impliquée dans la réserve, il se lance sur la piste de ce trafic ravageur.

Les choses prennent une tournure dramatique quand Nathan, son neveu de 14 ans, est arrêté pour possession et trafic de stupéfiants, suite à un coup monté. Pour le tirer d’affaire, Virgil n’a d’autre choix que de pactiser avec le diable : la police fédérale des wasicu (Blancs), qui veut se servir de Nathan comme appât pour démanteler un réseau venu du Mexique.

Dès lors le récit bascule dans le thriller, l’action s’emballe et Virgil découvre qu’en tant qu’Indien, il devra accepter la sagesse de ses ancêtres pour parvenir à ses fins. Le dénouement, dramatique à souhait, est digne des meilleurs récits d’action.

À la fois roman noir, polar ethnologique et thriller, ce récit émaillé d’expressions locales pose un regard cru sur la vie des Indiens Lakotas (ils n’aiment pas le terme Sioux, privilégié par les Blancs, et qui signifie « petits serpents »), tiraillés entre traditions amérindiennes et modernité. C’est à la fois exotique, dépaysant, instructif et captivant. Raconté par un auteur d’origine Lakota sicangu (sicangu : cuisses brûlées), outre l’intrigue policière, ce roman nous propose une incursion au scalpel au cœur de la vie d’une réserve avec ses problèmes (racisme, alcoolisme, violence, trafics, etc.) et ses traditions (rites religieux, légendes, modes de vie, etc.). Dépaysement et frissons garantis !

Éd. or. : Winter Counts, 2020 Trad. : Sophie Aslanides

Classé par Publisher’s Weekly dans les 12 meilleurs polars de l’année 2020

Norbert Spehner